Rimbaud aos 17 anos, retratado por Étienne Carjat, provavelmente em dezembro de 1871
Jean-Nicolas Arthur Rimbaud (Charleville, 20 de outubro de 1854 - Marselha, 10 de novembro de 1891) foi um poeta francês.
Produziu as suas obras mais famosas quando ainda era adolescente sendo
descrito por Paul James, à época, como "um jovem Shakespeare". Aos 20
anos já havia escrito 20 livros de poesia. Como parte do movimento
decadente, Rimbaud influenciou a literatura, a música e a arte modernas.
Era conhecido por sua fama de libertino e por uma alma inquieta,
viajando de forma intensiva por três continentes antes de morrer de
cancro, aos 37 anos de idade.
Rimbaud - Reginald Gray
in Wikipédia
À LA MUSIQUE
Sur la place taillée en mesquines pelouses,
Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.
Un orchestre guerrier, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres :
On voit, aux premiers rangs, parader le gandin,
Les notaires montrent leurs breloques à chiffres :
Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs ;
Les gros bureaux bouffis traînent leurs grosses dames,
Auprès desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de réclames ;
Sur les bancs verts, des clubs d’épiciers retraités
Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,
Fort sérieusement discutent des traités,
Puis prisent en argent, mieux que monsieur Prud’homme !
Étalant sur un banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois bienheureux, à bedaine flamande,
Savoure, s’abîmant en des rêves divins,
La musique française et la pipe allemande !
Au bord des gazons frais ricanent les voyous ;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Très naïfs, et fumant des roses, des pioupious
Caressent les bébés pour enjôler les bonnes…
— Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts, les alertes fillettes :
Elles le savent bien, et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.
Je ne dis pas un mot : je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles ;
Je suis, sous le corsage et les frêles atours,
Le dos divin après la courbe des épaules…
Je cherche la bottine… et je vais jusqu’aux bas ;
Je reconstruis le corps, brûlé de belles fièvres.
Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas…
— Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres…
Place de la Gare, à Charleville.
Sur la place taillée en mesquines pelouses,
Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.
Un orchestre guerrier, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres :
On voit, aux premiers rangs, parader le gandin,
Les notaires montrent leurs breloques à chiffres :
Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs ;
Les gros bureaux bouffis traînent leurs grosses dames,
Auprès desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de réclames ;
Sur les bancs verts, des clubs d’épiciers retraités
Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,
Fort sérieusement discutent des traités,
Puis prisent en argent, mieux que monsieur Prud’homme !
Étalant sur un banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois bienheureux, à bedaine flamande,
Savoure, s’abîmant en des rêves divins,
La musique française et la pipe allemande !
Au bord des gazons frais ricanent les voyous ;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Très naïfs, et fumant des roses, des pioupious
Caressent les bébés pour enjôler les bonnes…
— Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts, les alertes fillettes :
Elles le savent bien, et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.
Je ne dis pas un mot : je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles ;
Je suis, sous le corsage et les frêles atours,
Le dos divin après la courbe des épaules…
Je cherche la bottine… et je vais jusqu’aux bas ;
Je reconstruis le corps, brûlé de belles fièvres.
Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas…
— Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres…
Arthur Rimbaud
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